La France envisage d'emprisonner des militants pro-palestiniens

Publié le par La Gazette du Citoyen

Par Sam Carliner pour Counterpunch le 10 avril 2025

Image de Jordan Bracco.

Image de Jordan Bracco.

Les attaques contre le mouvement pour la Palestine s'intensifient. Suite à l'arrestation très médiatisée du prisonnier politique et militant du mouvement pour la Palestine, Mahmoud Khalil, plusieurs autres étudiants et chercheurs pro-Palestine aux États-Unis ont été enlevés par des agents fédéraux et menacés d'expulsion par l'administration Trump.
L'escalade des attaques contre le mouvement pour la Palestine ne se limite pas aux États-Unis. En France, l'État utilise des lois antiterroristes de grande envergure pour cibler des personnalités de gauche solidaires de la lutte palestinienne. Comme le rapporte le journaliste Olly Haynes dans Jacobin, ces lois antiterroristes ont déjà été utilisées pour condamner un militant syndical à un an de prison pour un communiqué contextualisant les attentats du 7 octobre, affirmant: «Les horreurs de l'occupation illégale se sont accumulées. Depuis [le 7 octobre], ils ont reçu les réponses qu'ils ont eux-mêmes provoquées.»
Le 18 juin, un autre militant syndical sera jugé. Anasse Kazib est cheminot, militant syndical, ancien candidat à la présidentielle et porte-parole de la publication/organisation politique Revolution Permanente (RP). Pour avoir publié sur X un article exprimant sa solidarité avec le peuple palestinien, il est accusé d'«apologie du terrorisme». S'il est reconnu coupable, il risque jusqu'à sept ans de prison. (Information: RP est le site frère de Left Voice, dont je suis rédacteur).
L'accusation d'«apologie du terrorisme» est une loi qui vise ouvertement à encadrer la liberté d'expression. Cette loi est issue d'un code pénal adopté en 2014 sous la présidence de François Hollande et rend illégal le fait d'«inciter directement à commettre des actes de terrorisme ou de s'en excuser publiquement». En clair, selon cette loi, il n'est pas nécessaire d'être accusé d'avoir commis des actes de terrorisme. Il n'est pas nécessaire d'être accusé de soutien matériel à des actes de terrorisme. Un simple discours considéré et vaguement défini par le gouvernement comme une «apologie du terrorisme» suffit à inculper un militant.
Sous la présidence d'Emmanuel Macron, la loi a été utilisée pour poursuivre plusieurs figures de gauche qui ont exprimé leur solidarité avec la Palestine. Parmi les autres personnalités interrogées figurent Jean-Luc Mélenchon, chef de file de l'un des partis de gauche les plus connus en France, ainsi que Rima Hassan, femme politique franco-palestinienne. Bien que Mme Hassan ne soit pas officiellement jugée, les poursuites judiciaires engagées contre elle ont permis à l'extrême droite française de réclamer la révocation de sa nationalité française.
Ces accusations constituent l'un des exemples les plus extrêmes d'un gouvernement utilisant la loi pour tenter de museler l'activisme pro-palestinien. Cependant, le gouvernement français n'est pas le seul à assimiler le plaidoyer pro-palestinien à un soutien au «terrorisme». Après l'enlèvement de Mahmoud Khalil, Trump a directement menacé sur les réseaux sociaux d'«expulser ces sympathisants terroristes de notre pays – pour ne plus jamais y revenir». Des campagnes de répression similaires ont été observées au Royaume-Uni, où 18 militants ont été arrêtés par la police antiterroriste et emprisonnés pendant des mois, ou en Allemagne, où des centaines de policiers ont mené des raids contre des membres du réseau Samidoun de solidarité avec les prisonniers palestiniens, après que plusieurs pays l'ont désigné comme groupe terroriste.
Kazib et RP tentent de contester les accusations en lançant une vaste campagne démocratique. Ils espèrent démontrer que la répression du mouvement pour la Palestine est une tendance internationale et que la résistance à cette répression est indissociable du combat plus large pour la libération de la Palestine. L'année dernière, ils ont diffusé une lettre dénonçant la répression. Cette lettre a reçu plus de 800 signatures de dirigeants, d'intellectuels et de militants de gauche, dont Bhaskar Sunkara, Clare Daly, Ilan Pappe, Keeanga-Yamahtta Taylor, Nancy Fraser, Jodi Dean et Robin DG Kelley. RP encourage également les journalistes et les médias du monde entier à couvrir l'attaque contre Kazib.
Comme le souligne RP dans un communiqué: «Face à cette répression croissante, et au-delà de toute divergence politique, il est essentiel que nous soyons solidaires d’Anasse Kazib, de ses camarades et de tous ceux qui sont pris pour cible en raison de leur soutien à la Palestine. La lutte contre l’oppression du peuple palestinien est indissociable de la lutte contre la criminalisation de ses sympathisants. Les lois qui criminalisent l’expression politique et assimilent la solidarité avec la Palestine au terrorisme sont des outils de répression politique. Dans ce contexte, obtenir l’acquittement d’Anasse Kazib et de ses camarades est une bataille cruciale pour le mouvement de solidarité au sens large. Le 18 juin, saisissons l’occasion du procès des militants de Révolution Permanente pour dénoncer la répression d’État en France et dans le monde.»
Sam Carliner est un journaliste spécialisé dans la politique étrangère américaine, le militarisme, l'immigration et les mouvements sociaux. Ses articles ont été publiés dans Teen Vogue, Responsible Statecraft, Middle East Eye, Truthout, Mondoweiss, Waging Nonviolence et d'autres publications. Il est également rédacteur chez Left Voice, qui fait partie du réseau d'information international La Izquierda Diario. Auparavant, il était responsable des médias sociaux au sein de l'organisation féministe pacifiste CODEPINK.
URL de l'article en anglais:
https://www.counterpunch.org/2025/04/10/france-looks-to-imprison-pro-palestine-activists/

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