Crimes de guerre et génocide: Responsabilité juridique

Publié le par La Gazette du Citoyen

Par L. Michael Hager pour Counterpunch le 19 décembre 2023

La bataille de Solferino, par Adolphe Yvon

La bataille de Solferino, par Adolphe Yvon

Lorsque l'homme d'affaires suisse Henri Dunant assista à l'issue sanglante de la bataille de Solferino en 1859, il fut frappé par la souffrance des blessés. Ses observations, relatées dans son ouvrage Un souvenir de Solferino (1862), ont conduit à la création de la Croix-Rouge internationale. Par la suite, la Convention de Genève de 1864 a marqué le début d'un processus juridique international qui régit non seulement les devoirs envers les blessés, mais aussi la protection des civils dans la conduite de la guerre.

Lorsque le public a visionné les épisodes enregistrés du massacre de civils israéliens, le 7 octobre, nous avons tous été Henri Dunant, consternés par les atrocités barbares commises par les militants du Hamas. Le droit international humanitaire, codifié dans les quatre conventions de Genève de 1949, protège les civils en temps de guerre et considère comme des crimes de guerre le meurtre de civils, la torture, le viol et la prise d'otages. Les militants individuels et les dirigeants du Hamas devraient être poursuivis pour ces crimes bestiaux.

Plus de deux mois après la déclaration de guerre d'Israël au Hamas, nous sommes également consternés par le massacre de civils palestiniens. La mort et la destruction qui se déroulent sous nos yeux sur les écrans de télévision et dans la presse écrite sont plus choquantes que les scènes de combat à Solferino.

La guerre de représailles déclarée par Israël contre le Hamas s'est transformée en une guerre contre tous les Palestiniens de Gaza. Sans compter les corps qui gisent sous les décombres, le bilan dépasse désormais les 18,000 morts, pour la plupart des femmes et des enfants.

Si les lois de la guerre autorisent les combattants à prendre pour cible les soldats ennemis se trouvant à proximité de civils, ces attaques doivent être soigneusement limitées afin de minimiser le risque de "dommages collatéraux". Malgré les protestations contraires des FDI, les bombardements et le pilonnage aveugles des lieux de résidences, des mosquées, des églises, des écoles et des hôpitaux, les évacuations forcées des résidents et le siège de la bande de Gaza visant à couper l'eau, la nourriture et les autres produits de première nécessité constituent non seulement des crimes de guerre et un nettoyage ethnique, mais aussi un génocide. Comment pourrait-il en être autrement compte tenu de la densité de la population?

Selon la définition de la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide, le génocide désigne des actes spécifiques commis dans l'intention de détruire "un groupe national, ethnique, racial ou religieux". Ces actes comprennent "le meurtre de membres du groupe" et "l'imposition intentionnelle au groupe de conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle".

L'article IV dispose que "les personnes qui commettent un génocide [...] seront punies, qu'il s'agisse de dirigeants constitutionnellement responsables, d'agents publics ou de particuliers". Le Premier ministre Netanyahou, son cabinet de guerre, ainsi que les soldats et commandants des FDI devraient être tenus pour responsables de génocide.

En fournissant des armes offensives à Israël et en refusant catégoriquement de se joindre à d'autres nations pour appeler à un cessez-le-feu, le président Biden a rendu les États-Unis complices du génocide israélien. Il s'est également rendu passible de poursuites judiciaires en raison de son "incitation directe et publique à commettre un génocide".

Se référant à l'accusation de crime de guerre portée par les États-Unis contre la Russie pour la torture d'un Américain en Ukraine, le directeur du FBI, Christopher Wray, a déclaré: "Nous sommes résolus à demander des comptes aux criminels de guerre, où qu'ils se trouvent et quel que soit le temps nécessaire".

Les remarques de M. Wray s'appliqueront-elles à la guerre d'Israël contre Gaza ? C'est peu probable, mais les nations du monde entier sont scandalisées par le veto opposé par les seuls Américain à une résolution du Conseil de sécurité le 8 décembre. Cette résolution aurait exigé "un cessez-le-feu humanitaire immédiat à Gaza". L'un des États membres de l'ONU (y compris la Russie) portera-t-il plainte contre M. Biden pour avoir aidé et encouragé le génocide israélien?

Israël reçoit actuellement 3,8 milliards de dollars par an pour l'achat d'armes américaines (souvent testées lors de guerres contre les habitants de Gaza). Pourtant, M. Biden voudrait fournir 14,3 milliards de dollars d'armes supplémentaires à Israël, des armes qui seraient sans aucun doute utilisées pour tuer davantage de Palestiniens dans la bande de Gaza. Le département d'État vient d'approuver la vente de 106 millions de dollars de munitions pour chars d'assaut à Israël. Les électeurs vont-ils estimer que de tels transferts leur assurent une plus grande sécurité ? Ou commenceront-ils à douter de la sagesse de nos "experts" en matière de renseignement?

Un article publié le 3 décembre par The Intercept, citant "un nouveau rapport qui fait l'effet d'une bombe" dans le journal israélien Israel Hayom, décrit une proposition de Netanyahou visant à "réduire" la population palestinienne de Gaza "au minimum" en déplaçant les Palestiniens vers d'autres pays arabes et/ou en ouvrant les voies maritimes pour permettre un exode massif vers les pays d'Europe et d'Afrique. Israel Today a fait état d'un plan proposé par des membres du Congrès qui conditionnerait l'aide américaine aux pays arabes à leur volonté d'accueillir des réfugiés palestiniens. Compte tenu des conditions inhospitalières de la bande de Gaza dévastée, de tels projets ne semblent pas aussi farfelus et immoraux qu'ils devraient l'être.

Si Henri Dunant était encore en vie aujourd'hui et voyait Gaza dévastée et ensanglantée, il déplorerait certainement l'incapacité du droit à protéger les civils. Seule l'obligation de rendre des comptes peut réparer cet échec et restaurer le respect du droit international.

L. Michael Hager est cofondateur et ancien directeur général de l'Organisation internationale du droit du développement, Rome.

Lien de l'article en anglais:

https://www.counterpunch.org/2023/12/19/war-crimes-and-genocide-legal-accountability/

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