Il y a 50 ans: la mutinerie des soldats en Éthiopie marquait le début de la guerre civile

Publié le par La Gazette du Citoyen

Par le World Socialist Web Site le 8 janvier 2024

Suite à la mauvaise qualité de la nourriture et de l'eau qu’on leur fournissait, le 12 janvier 1974, les soldats éthiopiens de la garnison de Negele Boran, dans le sud de l'Éthiopie, ont organisé une mutinerie. Cela a été la première d’une série de nombreuses mutineries, grèves et manifestations contre le gouvernement de l’empereur éthiopien Hailé Sélassié, soutenu par les États-Unis, qui fut évincé plus tard dans l’année.

La garnison de Negele Boran avait acquis une réputation parmi les soldats en raison de son emplacement éloigné et de ses conditions désolantes impliquant une chaleur intense, une nourriture presque immangeable et un approvisionnement en eau impur ou irrégulier. La mutinerie a éclaté lorsque la pompe à eau potable utilisée par les soldats de base est tombée en panne. Lorsque les officiers ont refusé de donner accès à leur propre puits, de qualité bien plus propre, les soldats les ont placés en état d'arrestation. Les hommes ont envoyé une pétition à Hailé Sélassié exigeant des améliorations à leurs conditions et d'autres griefs.

Manifestants éthiopiens, 23 août 1974

Manifestants éthiopiens, 23 août 1974

L'empereur répondit en envoyant son principal commandant militaire, le lieutenant-général Deresse Dubale, pour rétablir l'ordre. À son arrivée, il a été arrêté par les soldats qui lui ont fait manger et boire la nourriture et l'eau de mauvaise qualité contre lesquels ils protestaient.

Une fois que la nouvelle de l'arrestation de Dubale parvint à Hailé Sélassié, furieux, il ordonna que des bombardiers soient envoyés survoler la base, menaçant la garnison de massacre. Finalement, les soldats ont accepté de libérer le général à condition qu'aucune mesure disciplinaire ne soit prise à leur encontre. 

La période a été marquée par une immense crise économique en Éthiopie. La hausse importante des prix a créé des conditions généralisées de faim et d’inégalité. L'opposition militante à Hailé Sélassié et au système de gouvernement semi-féodal se généralisait. Dans ces conditions, la mutinerie de Negele Boran a déclenché des protestations et des rébellions dans tout le pays.

En février, des techniciens et sous-officiers de l'armée de l'air se sont également mutinés, prenant leurs officiers en otages. Quelques jours plus tard, les étudiants universitaires d'Addis-Abeba se sont mis en grève pour exiger des réformes du système éducatif. Les enseignants des collèges et lycées les ont rejoints peu après avoir réclamé des augmentations de salaires. En mars, la Confédération des syndicats éthiopiens a lancé une grève générale.

Influencés par le stalinisme, les syndicats ont concédé le contrôle politique de la situation aux militaires et ont tout fait pour empêcher l’intervention indépendante de la classe ouvrière pour prendre le pouvoir. En avril, des officiers rebelles formèrent le Comité de coordination des forces armées et commencèrent à procéder à des arrestations de responsables gouvernementaux. Le Comité allait bientôt devenir le Conseil administratif militaire provisoire, connu sous le nom de Derg, et lancerait un coup d'État le 12 septembre qui chasserait Hailé Sélassié du pouvoir.

Une fois au pouvoir, le Derg a proclamé son nouveau régime «marxiste-léniniste» afin de s’attirer les faveurs des staliniens de Moscou dont ils avaient besoin pour soutenir leur gouvernement dans la guerre civile qui a suivi. Le Derg détiendra le pouvoir en Éthiopie dans un état de guerre civile continuelle jusqu'en 1991, date à laquelle la restauration du capitalisme en Union soviétique lui refusa le patronage de Moscou.

Lien de l’article en anglais:

https://www.wsws.org/en/articles/2024/01/08/pecb-j08.html

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